Alors que les bonnets et les écharpes sortent, le froid et l’hiver arrivent avec de nouveaux défis pour l’agriculture urbaine. Au travers de ce billet, nous allons revenir sur les préparations nécessaires dans notre ferme urbaine Suzanne pour traverser cette saison.
Suzanne : une ferme urbaine face à l’hiver
L’hiver est une saison charnière dans l’année pour l’agriculture. En effet, on peut croire que l’activité se réduise ou s’arrête totalement comme une pause bien méritée. Mais ce n’est pas le cas, au contraire ! Que soit dans les campagnes ou dans les villes en agriculture urbaine, l’hiver rime avec travail pour les petites mains qui s’occupent de la terre.
Nous allons donc nous intéresser au cas de notre ferme urbaine sur toiture Suzanne avec Élise notre maraichère. Ce site est ouvert depuis avril 2020 en plein cœur du parc omnisport Suzanne Lenglen (15ème arrondissement de Paris).
Cette ferme urbaine, remportée dans le cadre de l’appel à projets Parisculteurs 2 (Ville de Paris), est implantée sur deux toits de vestiaires sportifs. À vocation productive, éducative et médiatrice, Suzanne est un véritable “laboratoire” à ciel ouvert.
Composée de deux toitures, toutes deux cultivées. La première est celle ouverte au public, d’une surface de 860m² dont 150m² de surface agricole utile (SAU) et 150m² de forêt et haies comestibles. C’est l’espace pour accueillir nos adhérents à notre offre de paniers maraîchers, les événements et animations multiples et les amateurs des jardins potagers.
La seconde toiture, appelée “champ” est une toiture de production de 570m² de surface (dont 200m² de SAU) avec une cinquantaine de variétés de cultures pour une production de saison et naturelle de fruits, légumes et plantes aromatiques.
Sur les bases d’une agriculture urbaine “low tech” et les principes de la permaculture, respectueuse des saisons, nous sommes convaincus qu’il faut redécouvrir toute la diversité et la richesse de récoltes de fruits, légumes et plantes aromatiques dont nous pouvons bénéficier pendant l’année.
Les préparatifs pour l’hiver chez Suzanne
Voici donc comment Suzanne se prépare pour l’hiver, entre deux cultures. Suite à une préparation et une planification des rotations de cultures sur l’année, avec l’objectif d’enrichir le substrat pour la saison suivante.
Tout d’abord, en ce qui concerne notre substrat T4P (technologie développée en lien avec AgroParisTech), un apport de compost est nécessaire car il s’est naturellement tassé de 10cm pendant l’année. Cela nécessite une remise à niveau de la butte. L’avantage de mettre en avance le compost à cette époque de l’année permet de le laisser vivre pour que la vie du sol s’installe au fur et à mesure.
Ensuite, notre équipe met en place un paillage sur les buttes d’ail. Le froid et la faible luminosité de l’hiver ralentissant la vie du jardin. Disposer de la paille sur les cultures permet un apport de carbone dans le sol suite à la décomposition. Bon à savoir ! Un paillage en hiver implique un nouveau paillage en été car il offre des avantages différents pour cette saison : diminuer les pertes en eau, garder le sol au frais et surtout réduire l’apparition des plantes sauvages.
Mais un risque assez méconnu existe, la faim d’azote. En effet, on peut produire un déséquilibre puisque le sol a besoin d’azote pour décomposer le carbone apporter par le paillage. Donc, pour que les plantes aient aussi suffisamment d’azote, il faut rajouter des déchets verts sur la culture. Il peut s’agir de tonte de pelouse, déchets alimentaires ou de marc de café. Ces déchets verts naturels vont vite se faire absorber par les plantes, il faudra donc bien veiller à répéter l’opération.
Puis, en ce qui concerne la continuité de production chez Suzanne, des plantations et semis effectués l’été peuvent être récoltés en hiver (par exemple, les choux kale ou chinois, les mâches etc..). Mais des plantations et semis sont aussi faits pendant l’hiver afin d’être récoltés au début du printemps, fin mars début avril (petits pois, l’ail, les fèves). Notre serre permet aussi de préparer et produire les plants dans de bonnes conditions pour lancer les cultures d’été. Par exemple, les aubergines ou les tomates ont besoin de chaleur et de soleil pour se développer et ainsi être planter pour une récolte en juillet.
Préparer une ferme pendant l’hiver nécessite aussi des travaux de taille pour répondre à un phénomène naturel formidable : l’aoûtement. Lors de la transition août-septembre, la nature se prépare naturellement pour l’automne. La sèvre descend dans les arbres et donne naissance à des bourgeons. Les bois ainsi formés sont donc à tailler, ce qui permet par exemple la préparation de bouture en détournant le bourgeon de l’arbre.
Enfin, du côté de la biodiversité et de nos amis à pattes, plumes ou poils, l’hiver apporte des changements à Suzanne. On observe beaucoup moins d’insectes autour des cultures mais plus d’oiseaux avec notamment des grives dont les chants entourent la ferme. Mais attention, dès le printemps, il faut prévoir des filets sur les nouvelles cultures pour prévenir de la faim des oiseaux qui n’hésitent pas à attaquer les cultures. On aperçoit aussi des hérissons ci et là et on entend même parler d’un renard qui vit dans le parc.
Pour répondre à ces nombreux défis saisonniers offerts par la nature, l’équipe d’Elise s’est développée avec deux nouveaux apprentis : Nicolas et Amandine. Ils vont s’occuper de la ferme pour une année dans le cadre de leur alternance.
Et dernière nouveauté, Suzanne collabore dorénavant avec Wecandoo afin d’accueillir des visites et des ateliers plusieurs fois par mois dans notre ferme. Pour repartir avec sa bouture ou sa propre tisane made in Suzanne, n’hésitez plus à vous rendre sur notre page artisan.
N’hésitez pas à venir nous rejoindre sur nos pages Facebook et Instagram pour suivre, semaine après semaine, l’évolution de la ferme.
Source.
Sur le principe d’aoûtement : Guide technique du Ministère de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la forêt : Réussir la plantation forestière. Page 59.